Nobel de la paix 2025 : la droite triomphe sans Trump
Entre hommage à la lutte démocratique et message diplomatique adressé à Caracas
Oslo, 10 octobre 2025 — Le comité Nobel a tranché. Le prix Nobel de la paix 2025 a été attribué à María Corina Machado, figure de la droite radicale vénézuélienne, cheffe de file de l’opposition au président Nicolás Maduro. Si cette récompense salue officiellement son engagement pour « une transition pacifique vers la démocratie », elle a aussi, selon plusieurs observateurs, des airs de message géopolitique adressé à Caracas — et plus largement, aux régimes qui défient encore l’influence occidentale.
Une militante farouche contre le chavisme
Âgée de 56 ans, María Corina Machado est issue d’une riche famille d’industriels dont les entreprises furent nationalisées par Hugo Chávez. Surnommée par la presse occidentale la « dame de fer de Caracas », elle incarne depuis plus de vingt ans la résistance la plus dure au pouvoir chaviste.
Anticommuniste déclarée, elle n’a jamais caché ses liens étroits avec l’aile trumpiste de Washington, notamment avec Marco Rubio et plusieurs conseillers de l’administration américaine.
Dans son communiqué, le comité Nobel justifie son choix :
« María Corina Machado reçoit ce prix pour son travail inlassable en faveur des droits démocratiques du peuple vénézuélien et pour sa lutte pour parvenir à une transition juste et pacifique de la dictature à la démocratie. »
Mais derrière ce langage diplomatique, beaucoup y voient une prise de position assumée contre le gouvernement de Nicolás Maduro, au pouvoir depuis 2013 et contesté sur la scène internationale soumise à l’ordre occidental hégémonique.
Le Venezuela, cible indirecte d’un Nobel politisé
La dernière élection présidentielle, tenue en juillet 2024, avait vu la droite vénézuélienne dénoncer des fraudes massives. María Corina Machado, déclarée inéligible, avait cédé sa place au diplomate Edmundo González Urrutia, que l’opposition affirme toujours vainqueur.
Pour plusieurs analystes latino-américains, le choix d’Oslo ne peut être lu hors de son contexte politique.
« Ce Nobel s’inscrit dans une stratégie plus large de légitimation des oppositions pro-occidentales », estime un diplomate sud-américain cité par El Nacional.
« Derrière la rhétorique des droits humains, c’est un signal envoyé aux régimes qui échappent au contrôle de Washington. »
Ainsi, le Venezuela — pays frappé par des sanctions américaines et allié de la Russie et de la Chine — apparaît comme le véritable perdant symbolique de ce Nobel. Une distinction qui, pour certains, fait écho aux tensions croissantes entre le Nord et le Sud global, sur fond de recomposition des équilibres mondiaux.
Un choix qui soulage Washington
Ce Nobel, que Donald Trump convoitait ardemment pour lui-même, pourrait finalement être perçu comme un lot de consolation pour le président américain. La Norvège, qui craignait de s’attirer sa colère, semble avoir trouvé un compromis diplomatique : récompenser une figure proche de son camp idéologique, tout en évitant le scandale qu’aurait représenté un Nobel directement attribué à Trump.
Un diplomate européen cité par Reuters résume cette ambivalence :
« Ce prix permet à Oslo d’envoyer un signal fort sans provoquer une crise ouverte. Machado est une opposante courageuse, certes, mais aussi un symbole commode dans la bataille d’influence contre les régimes anti-occidentaux. »
Un Nobel entre idéal et realpolitik
Entre reconnaissance du courage personnel et usage politique du symbole, le Nobel 2025 illustre une nouvelle fois la tension entre morale et géopolitique.
En honorant María Corina Machado, le comité Nobel célèbre indéniablement la voix d’une opposante à un régime considéré par certains autoritaire. Mais il envoie aussi un message clair : la paix, telle que définie par Oslo, reste profondément liée à l’orientation politique du monde occidental.
Auteur : ALG247.COM
(avec AFP, Reuters, France 24, Le Monde)
