Vers la fin de l’impunité fiscale des ultra-riches : la planète à l’aube d’un tournant ?
Le climat mondial est à la refonte des privilèges fiscaux des ultra-riches, porté par une pression sociale croissante et plusieurs réformes ambitieuses. Sous la houlette d’experts comme Gabriel Zucman, des États du G20 à la Suisse, la fiscalité des plus fortunés s’invite en tête de l’agenda politique. Mais s’agit-il d’une véritable rupture ou d’un simple ajustement de façade ?
Les réformes fiscales visant les ultra-riches connaissent une dynamique sans précédent, de la proposition d’impôt global minimal du G20 à la suppression du statut non-dom au Royaume-Uni. Tour d’horizon des politiques, enjeux et résistances autour d’un possible basculement historique.
La proposition Zucman : vers un impôt mondial sur les ultra-riches
À la demande de la présidence brésilienne du G20, l’économiste Gabriel Zucman a remis en 2024 un rapport de référence recommandant l’instauration d’un impôt minimal mondial sur la fortune: 2 % annuel dès le premier milliard de dollars détenu. Selon l’économiste, cette mesure pourrait générer entre 200 et 250 milliards de dollars par an, permettant de corriger le déséquilibre fiscal entre ultra-riches et citoyens moyens.
Le projet a trouvé écho lors des réunions des ministres des Finances du G20, bien qu’il soit confronté à des défis majeurs d’harmonisation fiscale et de lutte contre l’évasion.
Royaume-Uni : fin du régime « non-dom »
Une avancée concrète est visible au Royaume-Uni, où le gouvernement a acté la suppression du fameux régime « non-domiciled » (non-dom) dès le 6 avril 2025. Ce dispositif, hérité de 1799, permettait aux résidents étrangers d’éviter l’impôt sur leurs revenus étrangers. Désormais, seule la résidence fiscale comptera, accompagnée d’un régime transitoire de quatre ans pour les nouveaux arrivants.
Selon le Trésor britannique, cette réforme vise à renforcer l’équité fiscale. Des études comme celle de la London School of Economics estiment le gain potentiel à environ 3,2 milliards de livres, malgré les craintes souvent exagérées d’exil massif des grandes fortunes.
États-Unis : New York cible les millionnaires
À New York, sous l’impulsion du nouveau maire Zohran Mamdani, un projet de taxe additionnelle de 2 % sur les revenus dépassant un Million de dollars est à l’étude.
Cette mesure concernerait environ 34 000 contribuables et doit permettre de financer le logement, les transports et l’éducation. Le débat divise, certains élus craignant une fuite des capitaux. Toutefois, plusieurs recherches et etudes indiquent que la migration fiscale des super-riches reste marginale en cas d’augmentation d’impôts locaux.
Brésil, Europe, Suisse: une tendance internationale
Le Brésil, lors de sa présidence du G20, a milité pour la création d’un plancher fiscal mondial pour les plus fortunés. Des pays comme l’Espagne, l’Afrique du Sud, le Chili ou la Colombie se joignent désormais à cette initiative internationale.
En Suisse, un référendum prévu en novembre 2025 pourrait instaurer un impôt sur les successions à hauteur de 50 % pour les patrimoines dépassant 50 millions de francs suisses, même si les derniers sondages anticipent un rejet par la population de cette mesure. Malgré tout, cette idée démontre l’évolution des mentalités sur la question de l’équité fiscale.
Enjeux et obstacles majeurs
L’uniformisation globale de la fiscalité des ultra-riches se heurte à maints obstacles: coordination internationale difficile, menaces (surement surestimées) d’exil fiscal, lobbying intense des oligarques, inertie des législations nationales et concurrence entre États cherchant à attirer les capitaux.
Quelles perspectives pour la France et l’Europe ?
La France applique déjà une taxe sur la fortune immobilière et soutient la taxe minimale sur les multinationales. L’élan actuel pourrait l’inciter à renforcer la fiscalité sur les patrimoines et les plus-values, et à accélérer la coopération européenne pour traquer les flux de capitaux et trusts opaques. L’exemple du blueprint Zucman invite à réfléchir à un cadre harmonisé européen sur la taxation des grandes fortunes.
Le monde semble amorcer la fin de l’impunité fiscale des ultra-riches. Entre initiatives nationales et appels à l’harmonisation internationale, un tournant historique se profile à l’horizon, même si la mise en œuvre nécessite une volonté politique forte, des consensus rares et une coordination accrue. L’impact réel de ces transformations dépendra de la capacité des gouvernements à résister aux pressions des ultra-riches et à leurs véritables volontés d’instaurer une fiscalité plus juste, à même de réduire les inégalités d’un système aujourd’hui contesté.
ALG247.COM (avec agences)



